Les 230 chalets de Blériot-Plage vivent-ils vraiment leurs derniers jours ?

Partagé le 22/02/2021

Au nom de la loi littoral, la préfecture a donné aux propriétaires jusqu’à la fin du mois de février pour détruire les 230 chalets installés sur une plage, près de Calais.

  • La préfecture du Pas-de-Calais a exigé la destruction volontaire, avant la fin du mois de février, des chalets installés sur la plage de Sangatte-Blériot, près de Calais.
  • Un bras-de-fer est engagé depuis cinq ans entre les propriétaires de ces 230 cabanons de plage, l’Etat et la mairie de Sangatte.
  • Une association de défense des chalets revendique le statut de patrimoine social pour éviter leur destruction.

Le compte à rebours a commencé. La préfecture du Pas-de-Calais a demandé la destruction volontaire, avant la fin du mois de février, des chalets installés sur la plage de Sangatte-Blériot, près de Calais. Voilà plus de cinq ans qu’un bras-de-fer est engagé entre les propriétaires de ces cabanons de plage, l’Etat et la mairie de Sangatte, avec la loi Littoral pour toile de fond.

Ces 230 cabines de station balnéaire, datant pour certaines des années 1950, peuvent-elles être considérées comme un « patrimoine social et local », ainsi que le réclame l’association des Chalets Castor ? C’est l’enjeu de ce dossier qui crée beaucoup de tensions et de passion.

Une partie du paysage

« Sur le bassin d’Arcachon, ce genre de chalets peut se vendre jusqu’à 50.000 euros sans que ça ne pose visiblement de problème avec la loi littoral », dénonce Loïc Lassalle, président de l’asso des Chalets Castor. Cette loi n’autorise, en effet, théoriquement que des installations « démontables et transportables ne présentant aucun élément de nature à les ancrer durablement sur le sol. »

Or ces chalets, pour résister aux vents, aux marées et au mouvement de sable, sont solidement bâtis sur pilotis. Ils font même tellement partie du paysage que les bandes dunaires se sont modelées autour d’eux. « Si on les enlève, les risques de submersion pourraient augmenter dans la commune et aucune étude préalable n’a été menée sur le sujet », avance Loïc Lassalle.

Pourtant, la mairie de Sangatte estime que les dés sont jetés. « L’Etat, puis la commission régionale du patrimoine et de l’architecture ont déjà refusé de protéger ces chalets. On regrette cette destruction de soixante ans d’histoire, mais la loi doit être appliquée », souligne le maire, Guy Allemand.

Certains propriétaires ont donc récemment reçu un courrier de la préfecture leur enjoignant de « démanteler et d’évacuer les chalets » avec « une aide financière de l’Etat ». En contrepartie, ils pourront « bénéficier de l’opportunité du projet de la mairie », précise le courrier.

Projet de des cabines de plages démontables

Car cette affaire n’est pas une simple remise en état du littoral. A la place des chalets, la municipalité de Sangatte a prévu d’installer des cabines de plages démontables qui pourront être louées, « en premier lieu aux propriétaires des chalets », précise le maire. La décision a été votée par le conseil municipal en décembre.

« Ces structures démontables vont provoquer davantage de nuisances que les chalets sur la nature. Il va falloir les installer au printemps et les retirer en automne avec des engins qui vont abîmer les dunes et perturber les oiseaux nicheurs », assure Loïc Lassalle qui a demandé audience auprès de la nouvelle sous-préfète de Calais.

L’objectif de l’association est d’obtenir un label d’intérêt patrimonial et touristique pour ces chalets. « Ils représentent un pan de l’histoire régionale, raconte le président des chalets castor. On venait des mines pour profiter de l’air iodé. C’était conseillé par les médecins avec un protocole de mise à l’eau très strict. Pour une arrière-grand-mère de 94 ans, son chalet, c’est toute sa vie ».

Une pétition en ligne

Problème, ces cabanons sont parfois en piteux état. « La municipalité ne nous autorise pas à faire des travaux de rénovation. Elle nourrit d’autres ambitions pour le tourisme », se plaint aussi Loïc Lassalle.

« Nous ne sommes pas responsables de cette situation et pas question que la municipalité embarque les propriétaires dans un contentieux avec l’Etat, ce qui s’apparenterait à un suicide collectif, répond Guy Allemand. Nous avons obtenu des financements pour la démolition de ces chalets qui ne sont pas tous respectueux de l’environnement. Nous ne pouvons pas faire davantage. »

Le maire avoue qu’il s’agit du « dossier le plus lourd » de sa gestion municipale depuis 2006. « Ça m’étonnerait que des chalets soient démolis pour le 1er mars. Je ne sais pas jusqu’où les exaltations peuvent mener. Ça va être difficilement gérable », s’inquiète-t-il.

Une pétition a été mise en ligne depuis la mi-décembre pour sauvegarder les chalets de Blériot Plage. Elle a recueilli près de 6.800 signatures.