Témoignage: « Le froid n’a pas eu raison de moi » : Stève Stievenart narre son relais dans la Manche

Partagé le 17/01/2024

Le nageur français de l’extrême Stève Stievenart, 46 ans, a réalisé un exploit samedi 13 janvier 2024 en traversant la Manche, en relais avec quatre autres athlètes, en plein hiver. Une première mondiale. Revenu de sa folle aventure, il s’est confié à Ouest-France et Prolongation.

« Je m’apprêtais à aller nager dehors avant ma séance d’ostéopathie… On ne s’arrête pas ! » À l’autre bout du fil, Stève Stievenart, dit « Le Phoque », se marre. À peine revenu d’une traversée inédite de la Manche en relais en hiver, l’expérimenté nageur de l’extrême, 46 ans, voulait replonger.

Samedi 13 janvier 2024, lui et ses quatre équipiers – deux Irlandais, Ger Kennedy et Vincent Doneghan, ainsi que deux Anglais, Lee Johnson et John Myatt -, ont rallié Douvres (Angleterre) au Cap Gris Nez (France) en 14 heures et 45 minutes dans une eau oscillant entre les 7 et les 9 degrés. Une grande première, puisqu’aucun nageur n’avait jusque-là tenté une telle traversée en hiver.

La course était au départ un relais face à une équipe féminine, contrainte d’abandonner à cause d’un problème technique. Sans combinaison (la discipline l’interdit), Stève Stievenart, quatrième relayeur, a repoussé ses limites dans l’eau glacée et face au thermomètre (2 à 3 °C).

Déjà le premier Français à avoir traversé la Manche aller-retour en 2020, le premier aussi à avoir traversé le lac Léman en septembre 2023, Stève Stievenart cumule les exploits. Et ne compte pas s’arrêter là. Dans un entretien accordé à Ouest-France et Prolongation, il a raconté sa folle aventure.

Comment ce projet de relais dans la Manche en hiver est-il né ?

Il y a quatre mois, Ger Kennedy, qui était a l’initiative de la traversée, m’a appelé pour savoir si j’étais prêt physiquement et intéressé. Je lui ai répondu par l’affirmative, donc on pouvait faire des tests. Ils ont été concluants, et à la suite de ça, je me suis attelé à deux entraînements quotidiens. Je voulais être à la hauteur de mes coéquipiers, d’autant plus que chez eux, c’est vraiment ancré dans leur culture ! Ici, en France, en hiver, il y a trois ou quatre personnes dans l’eau… Et encore ! (rires) Je suis parti de chez moi samedi matin très tôt. Je suis arrivé pour le bateau et on a tiré au sort les numéros de relayeur. Ça s’est passé très vite, on n’a pas eu le temps de trop réfléchir ! (rires)

Pourquoi cette épreuve vous attirait-elle tant ?

C’est une première mondiale de nager ainsi en hiver. Le fait de partager cette expérience avec d’autres nageurs m’a aussi donné envie d’y prendre part. Mais la principale source de motivation pour moi était la cause. Cela va permettre de lever des fonds pour l’association Power of one, qui sensibilise à la cause animale et défend les animaux des rues. C’est une cause qui me parle, à laquelle je fais très attention (le montant des fonds levés n’a pas encore été communiqué par l’association).

Comment vous êtes-vous préparé physiquement à ce défi ?

J’ai dû mettre en place des entraînements spécifiques. J’avais déjà participé à des relais l’été, mais en hiver, jamais. Nager une heure avec une grosse intensité, remonter sur le bateau, se réchauffer, et repartir au froid, c’est là tout le travail. Je me suis entraîné comme si je faisais des relais dans les mêmes conditions. Je nageais une heure, je ressortais de l’eau, je me réexposais au vent afin d’habituer mon organisme à ces variations de température. Et au bout de quinze minutes, je replongeais. Je me suis entraîné chez moi seul et je suis allé en Angleterre m’entraîner avec Lee Johnson, qui est un ami.

Et mentalement, comment vous êtes-vous préparé à nager dans une eau si froide ?

Le mental représente 90 % de réussite dans ces épreuves. C’est un entraînement quotidien. Je pratique beaucoup la méditation afin de visualiser le projet et surtout sa réussite. Il y a aussi un mode de vie à avoir pour se préparer à résister au froid. Par exemple, je n’ai pas de chauffage chez moi. J’ai un poêle à bois pour me réchauffer quand je rentre de l’entraînement mais sinon, il fait 8 dans la chambre ! (rires) Ma douche est dehors, je suis en short, t-shirt toute l’année. C’est une quête permanente de résistance au froid. J’ai une combinaison naturelle, d’où mon surnom : j’ai pris 47 kg volontairement en quatre ans, en m’inspirant du régime alimentaire des phoques. J’ai compris que même si on nageait bien, c’est le froid qui avait raison de vous. Je me suis fait une enveloppe naturelle en mangeant du poisson gras, des avocats, etc. C’est ça qui...